Note économique et financière – Juillet 2019

Bilan | 5 août 2019

Catherine WAJSMAN répond à une batterie de questions destinées à aider à comprendre l’évolution des marchés au trimestre passé et à anticiper les mois à venir.

Les marchés ont explosé à la hausse au cours de ce premier semestre 2019. Quelle est votre analyse ?

Le niveau des taux est une donnée fondamentale. Mario Draghi a déclaré que la Banque centrale européenne était prête à intervenir à la fois en rachats d’actifs et en taux d’intérêts. La FED a laissé une porte ouverte quant aux taux directeurs. La conviction générale – qui est l’une des causes de la hausse des marchés – est que les taux ne sont pas sur le point de renouer avec la hausse.
Les investisseurs savent que les banquiers centraux se montrent prêts à intervenir pour éviter tout embrasement des marchés financiers, notamment en cas de crise Iranienne ou de guerre commerciale entre Washington et Pékin,

Le stock mondial de dette à taux négatif est proche de son plus haut historique. Les taux à 10 ans en France sont passés sous la barre des 0 %. Quels sont les avantages et les risques de cette situation ?

Il ne faut en aucun cas occulter l’anomalie que présentent les taux négatifs. Si l’on prend l’exemple des français, qui ont toujours privilégié l’épargne sans risque, leurs économies sont placées massivement en fonds euros au sein de leurs contrats d’assurance vie. Les rendements des fonds euros s’enfoncent chaque année. Les marges bancaires sur les prêts deviennent dérisoires et celles des compagnies d’assurance n’ont rien à leur envier. 1L’endettement du secteur privé est un sujet d’inquiétude pour les autorités financières. En France, rapporté au PIB, l’endettement des ménages et des entreprises est le plus élevé parmi les grands pays européens : 132 % à fin 2018 à comparer à 119 % en moyenne pour les pays de la zone euro. La poursuite de l’assouplissement progressif des conditions d’octroi de crédit, en particulier dans l’immobilier, n’est pas rassérénant, d’autant que certains économistes prévoient désormais des taux directeurs bas à un horizon de 5 à 10 ans. Pour mémoire, le modèle « à la japonaise » – 25 ans de taux zéro en l’absence d’inflation – apparaît sous forme d’épouvantail.

Quels ont été les principaux événements du premier semestre, tant sur le plan politique que sur le plan financier ?

Sans hiérarchiser, le décrochage d’Apple en janvier, les résultats époustouflants du luxe, le virage à 180 degrés des politiques monétaires des banques centrales, le tassement sérieux de la croissance en Allemagne et en Italie, la morosité du secteur automobile, la proposition de fusion faite par Fiat Chrysler à Renault, le report de la date du Brexit au 31 octobre, l’annonce par Donald Trump de taxes douanières sur 200 Mds de dollars sur les produits importés de Chine…

L’été ne sera pas « chaud » ?

L’été est souvent une période redoutée par les investisseurs. Sur les vingt dernières années, quatre étés ont perdu entre 10 et 20 %. Cela dit, l’histoire financière nous a appris à ne pas jouer le « timing » et surtout pas le « timing » court terme. Il est plus sage de se positionner sur des valeurs de croissance sur le long terme, quitte à « faire le gros dos » par temps de tempête.

Avez-vous une opinion sur ce qu’il est convenu d’appeler la guerre commerciale entre l’Oncle Sam et l’Empire du Milieu ?

Il ne faut pas se tromper d’analyse. L’affaire Huawei – numéro 2 mondial des smartphones et acteur important du déploiement de la 5 G – n’est pas que symbolique. Intel, Qualcomm, Microsoft ne sont plus autorisés à fournir des composants à Huawei. Il s’agit pour les Etats-Unis de conserver leur prédominance économique face à une Chine dont les dirigeants favorisent la croissance : en d’autres termes, deux géants qui s’affrontent pour la suprématie, les enjeux commerciaux pouvant même être supplantés par ceux liés à la Sécurité Nationale. En 2018, les ventes de Huawei en Europe ont bondi de 66 % alors que celles d’Apple ont baissé de 23 %.  2D’après l’organisation mondiale de la propriété intellectuelle, la Chine a déposé en 2017 1.38 M de brevets (43.6 % des brevets mondiaux contre 19.2 % d’origine américaine).
Il faut reconnaitre que la dimension technologique de ce conflit mobilise de façon importante la nation américaine et entraîne une adhésion profonde des citoyens américains à leur pays et à leur système.

Revenons en France, pouvez-vous nous donner votre opinion sur l’incident H2O ?

Je regrette qu’un journal aussi sérieux que le Financial Times ait été à l’origine d’un incident qui, à mes yeux, n’aurait jamais dû exister. En finance, les process sont fondamentaux mais la confiance que l’on porte aux gérants – lorsqu’elle est fondée sur la durée – est tout aussi importante.
Les stratégies d’H2O comprennent principalement des contrats de futures et des contrats de change à terme sur le marché des devises. Aussi, je ne vois pas en quoi un peu moins de 10 % (souvent 4 %) donc une part très marginale d’actifs illiquides performants au sein d’un portefeuille nuisent au résultat final. Malgré le tsunami provoqué par cet article et relayé à la vitesse de la lumière, la société H2O a réussi à reconstituer sa performance – du moins pour le fonds H2O MULTIBONDS qui est notre « mascotte » – en repositionnant le fonds, en moins d’un mois, au plus haut du plus haut.
Je me contente de rendre hommage à des gérants qui ont su pendant des années, grâce à leur vision macro-économique et leurs techniques de gestion non dénuées de risques, réaliser des gains hors du commun.

Et le second semestre ?

Le rebond des marchés doit être regardé comme un retour à la moyenne après les fortes baisses d’octobre à décembre 2018. En ce qui concerne les différentes catégories d’actifs :

  • Sur le plan des devises, traditionnellement, nous nous éloignons le moins possible de la monnaie de référence des portefeuilles des clients tout en nous permettant une diversification sur le dollar.
  • Obligations : Un réel intérêt pour les émissions d’entreprises et, le cas échéant, les convertibles.
  • Actions : Nous privilégions en Europe et aux Etats-Unis les secteurs en croissance : Santé, Technologie et pourquoi pas en Asie : le quadruplement du poids des actions 3 chinoises dans l’indice « Emerging Markets » portera leur part à 3.3 % et pourra entrainer jusqu’à 70 milliards de dollars de flux.
  • Diversifiés : Après des années d’absence sur les hedge funds, nous recherchons de nouveau les long/short performants.
  • Or : Un zeste en fonds de portefeuille en cas de ralentissement économique prononcé.

En conclusion

Toute diminution des risques politiques sur fond de résultats économiques satisfaisants nous conduira à augmenter l’exposition au risque actions.


Avertissement

La présente note de gestion correspond à une simple information destinée à faciliter la compréhension des marchés financiers. Elle ne constitue pas une recommandation.
Les gérants d’Opportunité LUXEMBOURG / BELGIUM n’ont pas l’obligation de prendre en compte ou d’appliquer les réflexions contenues dans la présente note de gestion.
Les tentatives de prévisions concernant les évolutions des marchés sont basées sur des hypothèses qui peuvent ne pas se concrétiser.
Par ailleurs, Opportunité peut émettre d’autres analyses et n’a aucune obligation de s’assurer que de telles autres analyses sont portées à la connaissance des destinataires de la présente note de
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